Merci à Frère Jean pour ce beau texte !
Un compagnon nous rend visite;
il affirme: " il n'y a qu'une seule façon d'apprendre."
Vivement intéressés, nous lui demandons
de nous révéler cette unique façon
afin de la mettre en pratique.
Le compagnon témoigne:
"D'abord savoir ce que l'on veut.
Si le postulant ne sait pas ce qu'il veut,
on ne peut pas l'aider.
S'il souhaite travailler la pierre, le bois, le fer...,
nous allons tout faire pour l'initier à cet art.
mais si le postulant hésite, se cherche, ou veut régler des comptes,
nous ne pouvons rien faire pour lui,
nous attendons qu'il choisisse, qu'il se décide, qu'il s'engage.
Ensuite chercher l'Ancien qui a acquis l'expérience
de ce qu'il souhaite acquérir.
Apprendre seul est une perte de temps et d'énergie inutile.
On ne s'initie pas à la taille de la pierre avec un philosophe,
ni à la peinture avec un grand musicien mais avec un peintre.
Puis écouter l'Ancien et le regarder faire.
Il n'y a pas d'évolution sans écoute.
A travers l'enseignement,
ce n'est pas l'humain qui s'exprime,
mais la tradition, la sagesse du geste, le respect de l'objet,
l'amour du travail bien fait.
Enfin accomplir un chef d'oeuvre.
l'enseignement se vérifie par l'incarnation
qui révèle la maîtrise de la technique de l'apprenti.
Si l'oeuvre n'est pas harmonieuse, c'est son manque de vigilance qu'il faut condamner
et non les événements, la matière ou l'Ancien.
On reconnait un artiste à son oeuvre ! "
Le maître compagnon sourit, avec douceur il répète :
" Savoir ce que l'on veut,
chercher l'Ancien qui a acquis l'expérience,
écouter l'Ancien et le regarder faire,
accomplir un chef-d'oeuvre;
Il n'y a qu'une seule façon d'apprendre:
c'est d'aimer ce que l'on fait,
car la lumière que nous cherchons,
nous la portons dans le creux de nos mains. "
Souvent des artisans disent au compagnon:
"Il y a peu de bons maîtres."
Inlassablement il répond:
"Il y a peu de bons disciples."
Un artiste véritable est serviteur de son art,
il n'en est ni le maître ni le valet.